Campagne Zéro

« C’est notre meilleur allié contre Hollande. Il faut qu’il grappille le maximum de points. S’il monte encore, on lui fera une statue » Un ministre du gouvernement à propos de J. L. Melenchon (Le Parisien)

La campagne présidentielle 2012 s’annonce comme un bide politique. Politique au sens du débat d’idées, de la confrontation, de l’esquisse de solutions. Dans un monde qui n’en a surement jamais autant eu besoin. Crise économique, défaillance systémique, dévastation sociale, perte de perspectives (mais aussi retour aux nationalismes réactionnaires) sont la toile de fond du rendez-vous politique de 2012. En écho, tout ce qui est proposé se cantonne à des débats sporadiques. Relevant souvent de l’anathème politique comme la polémique sur la viande halal, la tragicomédie des propos de C. Guéant sur les civilisations ou les péripéties de N. Morano. De plus, et faute de mieux, la vacuité s’impose comme étalon, l’observation scientifique des courbes d’opinions s’impose comme un thème principal.

On peut y trouver motif de curiosité faute de réjouissance. Une campagne inintéressante peut finalement avoir de l’intérêt pour ce qu’elle ne fait pas, ne dit pas, s’oblige à taire. Elle parle tout aussi bien de son époque qu’une campagne où tout serait sur la table. Pour changer le monde. Or ici, là, et aujourd’hui, on le sait, on le dit, rien ne changera.

Et chacun en a conscience.

On se plait à se lamenter du caractère ennuyeux. De cette tournure violente, réactionnaire qu’ont pris les débats de cette présidentielle. Editorialistes en tête, qui vocifèrent sur le manque de souffle de la brochette de nominés en lice pour le poste suprême. Toute la subtilité de la situation tient à ce que chaque proposition soit frappée du sceau de l’impossibilité. Une impossibilité systémique car comme il est rabâché, la puissance publique ne dispose plus des moyens de financer son action. C’est ce que répète sur toutes les longueurs J. M. Aphatie, pour ne citer que lui. Qui dans le même temps, se fend d’éditos longs comme un bras pour pointer les contradictions du discours politique de tel ou tel. Si la campagne est d’une rare pauvreté, c’est parce qu’elle s’est minéralisée dans le concept du zéro budget.

Un zéro budget dont les politiques de tous bords respectent scrupuleusement le précepte. Il n’est pas un discours de F. Hollande, candidat de la gauche, où il ne martèle après chaque proposition, aussi infime soit-elle, qu’il faudra faire des efforts budgétaires. Entendre que les admonestations de J. M. Aphatie et ses clones ont bien été intégrées.

Et si F. Lenglet étrenne son statut de star médiatique, idole journalistique du moment, c’est bien parce qu’il se fond parfaitement dans le moule du zéro budget. Il incarne totalement la rigueur éditocratique dans la version scientifique du débat politique. Graphiques et crobars à l’appui.

Alors on feint de s’étonner du caractère lapidaire et violent des débats publics. On regarde un peu consterné la prévalence du gestionnaire sur le politique. On s’enquiert de la désaffection du citoyen à la chose publique. Alors que dans le même temps tout est mis en œuvre pour évaluer au centime près chaque sous-proposition de chaque programme. Sachant qu’au bout du bout, rien ne sera possible. Et pas grand-chose ne sera fait.

La campagne 2012, outre ses polémiques verbales idiotes, s’avère d’une rare stérilité. Elle est peut-être la photographie d’une époque, où le renoncement est devenu la valeur collective ?

Vogelsong – 15 mars 2012 – Paris

8 réflexions sur “Campagne Zéro

  1. aaah il faudra faire des efforts budgétaires ben oui :

    supprimer des niches sociales ou fiscales.
    supprimer des aides ou les allouer à d’autres où elles seront plus utile.
    lutter contre la fraude fiscale et la fraude sociale (travail au noir) ? c’est
    regarder si chaque Euro dépensé l’est justement ? c’est un truc anti-social ?
    regarder si l’état ou les collectivités ne se font pas facturer trop cher des prestations ? c’est anti-social ?

    Et t’a raté le moment ou il a demandé que la BCE/BEI finance – à faible taux – des investissement d’avenir : énergies renouvelables etc.. Là ce n’est pas l’inspiration d’Apathie ou de Namias ou encore de Lenglet.

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  2. Le renoncement est la suite logique d’une grande lassitude , d’un quinquennat qui ne nous a jamais paru si long et si épuisant .

    D’une idée à l’autre , d’un extrême à l’autre Sarkozy a navigué au gré des vents tournants . Le nez braqué sur les sondages qui lui servaient de boussole , il a cru bon pour gagner quelques points de dire ou de faire tout et son contraire .

    Il a voulu tout faire seul , tout karchériser de la cave au grenier . Mais après avoir désigné par quelle « racaille » il allait commencer , il a tout abandonné en cours de chantier pour courir sur un autre , laissant aux autres , c’est à dire aux citoyens , l’immense « honneur » de ramasser ses morceaux éparpillés et de se débrouiller seuls , abandonnés.

    Il a privé les services publics de la moitié de ses effectifs , il a vendu à ses petits copains les bijoux de famille , il a vampirisé les médias , s’est comporté plus en gourou qu’en chef d’état !

    Alors le citoyen lambda que nous sommes s’est dit puisqu’on a tout essayé et qu’on en est arrivés là , c’est qu’il n’y a plus rien à faire . Dégoûté de tout , blasé et sans illusion , il prononce le plus souvent des paroles comme « tous pourris » ou « droite et gauche c’est pareil » que « mais c’est bien sûr , je suis d’accord à cette proposition » .Le nihilisme et l’arrogance de celui qui a tout compris à tout est devenu l’habit qui se porte le mieux . Ca évite ainsi autant de discussions peu passionnantes sur le fond

    Cependant il reste une seule chose encore réalisable , juste pour se venger , celle de changer de président pour un autre qui de toute façon sera le même arnaqueur ! Celui là on n’en veut plus on zappe .;pour y revenir peut-être 5 ans plus tard qui sait ??

    Notre pays est en état de désertification politique . Plus rien ne sert à rien , plus aucune prise sur rien , plus de décision possible , nous sommes ligotés par la finance , et pire nous n’avons même pas envie de lui résister tant nous avons l’espoir de nous en sortir personnellement ..Et tant pis s’il n’y a pas de place pour tout le monde .

    Alors en attendant autant se faire plaisir en votant pour les extrêmes , comme ça , pour rire , sans même avoir tout analysé , juste pour montrer qu’on est mécontent et comme l’écrivait un blogueur « pour être content et fier de soi , d’avoir pu montrer à nos enfants qu’on en a » .

    Celui ou celle qui parlera le plus fort , même si c’est pour dire des énormités sera donc notre futur élu ! Celui dont le spectacle sera le plus attirant aura notre préférence . Le fond on s’en tape car l’hypocrisie n’a plus de frontières contrairement à l’immigration .

    Ségolène Royal avait eu l’immense mérite de faire croire en la politique en la pratiquant autrement , certains intellos et beaufs se sont cru malins de se foutre d’elle , résultat 5 ans de cauchemar pour en arriver aux candidats actuels qui pousseraient presque à nous abstenir !

    A qui profiterait donc le crime ? A ceux bien sûr qu’on fustige tous les jours , à ces marchands de vie artificielle , à ces traders sans frontières , à ces dictateurs internationaux qui jouent avec nos sous et nos vies comme on joue au Monopoly !

    Avons-nous vu un pion se rebeller et vouloir autre chose que de gagner la partie contre « l’autre » , l’autre pion je parle , pas celui qui le manipule ?

    Et pourtant qui nous oblige à rester sur « l’échiquier » , à ne pas prendre nos vies en main , à ne pas inventer d’autres formes de commerce et d’échanges ? RIEN , si ce n’est comme je le disais au début qu’une immense lassitude et une dépression collective qui commencera peut-être à guérir à condition de changer de médecin !

    Mille excuses d’avoir été un peu long .

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  3. le renoncement est devenu la valeur collective ?

    Tu me permettras de ne pas être d’accord car tout de même il me semble bien qu’il y ait dans le projet d’un des candidats autre chose que du renoncement. C’est au contraire une démarche volontariste consistant à sortir de ces 5 années où les dirigeants UMP avaient les yeux rivés sur les cours du CAC 40 plutôt que sur le prix de la baguette et les statistiques des fermetures d’entreprises dont la cause majeurs est la désindustrialisation rampantes aux bénéfices des possesseurs de capitaux.

    Pour la droite au pouvoir, ls ont d’abord décrié les agences de notations pour ensuite les écouter et faire la politique qu’elle attendaient. Bien évidemment je ne vais pas faire le catalogue des mesures prises arrivant au final à accroitre les inégalités et à accentuer les privilèges de certains.

    Les pions sont de couleurs différentes et si certaines parties de l’échiquier peuvent être communes, il y a a d’autres où ce n’est pas le cas. Il appartient « au politique » de reprendre les choses en main, si on ne commence pas en 2012 alors s’en est terminé de nos illusions de justice sociale, fiscale, environnementale.

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  4. Pingback: » intox2007 Aphatie partout ou TINA dans la tête de certains ?

  5. la Narratrice :

    Tiens, j’ai écrit pour toi ces quelques lignes… c’est l’histoire d’une narratrice qui s’adresse à sa cantatrice. Je suis la narratrice. Tu es la cantatrice. Tu vas donc t’appliquer pour me restituer toutes ces répliques et puis chanter

    La Cantatrice :

    Oui

    La Narratrice :

    Debout! Et reproduis-moi le personnage tel que je l’ai imaginé… On y va Diva ?

    La Cantatrice :

    Oui

    (Elle balance le carnet qu’elle a à la main)

    La Narratrice :

    Ramasse ! Il faut être la créatrice et la créature de ta propre voix… nulle distance ne doit te séparer de ton image intérieure. Il faut donner l’impression que tu as trouvé le son correspondant.

    La Cantatrice :

    Vous m’avez engagée à être moi-même… vous m’avez obligé à devenir ce que j’aspirais confusément à être… quelqu’un… quelqu’un qu’on écoute mieux… quelqu’un dont les mots importent… quelqu’un qui vit une vie toute neuve…

    La Narratrice :

    Regarde tes notes… laisse ton chant s’élever de son propre désordre !… ne contiens pas ton énergie! Écoute-la! Bon sang! Bon sang! On doit frémir à t’entendre comme si l’étoffe sonore que tu projetais était la forme et la matière même de celui qui t’écoute!

    La Cantatrice :

    Je ne suis qu’une voix… vous êtes ma vision. Vous m’avez appris la mine… l’allure… le style… vous avez éveillé en moi la conscience de mon visage, ce miroir à l’envers qui dispense du vrai miroir.

    La Narratrice :

    Sois sans racines, sans maître, sans modèle… sans personne à imiter, sans rien à admirer… laisse en toi le souffle prendre le dessus… lorsque tu chantes… chante comme si tu étais la douleur du monde.

    La Cantatrice :

    Lorsque je chante… je deviens comme la nature… naturelle… je redeviens comme je suis… sincère

    La Narratrice :

    Ne sois pas naturelle… ne sois pas sincère… sois plutôt vivante… tu as un timbre… mais tu dois oser un ton… tu as une vie… mais tu oublies de vivre…

    La Cantatrice :

    Si je me dis tous les matins du monde que je suis forte, est-ce que ça changerait quelque chose pour moi?

    La Narratrice :

    Tu pourras devenir forte mais d’une force qui sera conforme à ta faiblesse actuelle et n’ira pas au delà de cette faiblesse. Ce sera un changement sur le même plan mais pas un changement de plan!

    La Cantatrice :

    Vous faites briser toute ma réalité première… dites…qu’est-ce qui me manque à part vous ?

    La Narratrice :

    Tout! Absolument tout! Tu n’as ni la loyauté… ni la lumière du son… tu n’as rien de fluide, rien de latin. De temps en temps… j’ai l’impression que tu n’es que le support savant d’un courant d’air qui le traverse et te soulève du dedans. Ton élocution n’est pas toujours intelligible. La clarté… voilà ce qui te manque !

    La Cantatrice :

    C’est peut-être ma manière à moi de concilier le feu et la flamme

    La Narratrice :

    Tu n’as aucun sens du drame musical. Tu ne racontes pas assez les sons à mon goût… tu ne joues pas, tu interprètes !

    La Cantatrice :

    Imprimez en moi une tension

    La Narratrice :

    Quel est l’intérêt de te maquiller du dedans ? Fais résonner ton désir de sons graves aigus, murmurés, heureux et douloureux, comme dans l’amour … Chante comme si tu étais propulsée par un désir violent… vis comme si les conventions étaient oubliées, les frontières brisées… l’idéal défiguré ! Chante à présent!

    La Cantatrice :

    Tutte le feste al tempio

    Mentre pregava iddio

    La Narratrice :

    Non non et non ! Va plus au dedans… comme si tu étais fêlée… Il y a comme une sorte de nudité masquée qu’il faut faire ressortir… recommence !

    La Cantatrice :

    Tutte le feste al tempio

    Mentre pregava iddio

    Bello a fatale un giovne

    offriasi al guardo mio

    La Narratrice :

    guardo mio… guardo mio ! C’est un possessif, bordel de merde ! C’est le mot de la fin… il y a chute et élévation à la fois. Le mal est intégré… il faut l’exprimer fatalement comme il est… de toute beauté… de toute éternité.

    La Cantatrice :

    Ah! Si seulement c’était moi

    La Narratrice :

    Disons que c’est toi. Il faut franchir la limite, un point c’est tout.

    La Cantatrice :

    Je crois qu’elle est infranchissable

    La Narratrice :

    C’est parce qu’elle est infranchissable … que tu dois la franchir… maintenant… va t’en ! La musique, ça vous laisse des marques.

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  6. En tout cas, on ne renonce pas à faire de la campagne un super-spot télé. Je n’ai jamais vu autant d’émissions de télé, d’ébats médiatiques autour d’une présidentielle. A tel point qu’on se demande si on n’a pas élu Pompidou vraiment à la légère.

    Quant au renoncement, une valeur ? Idée tentante. Mais pour avoir 60 millions de maîtres zen, il faudra encore que le prix de l’essence augmente et quelques campagnes électorales. On aura même sans doute quelques immolations en prime.

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