Le retour de la démocratie passera par la 6e République

“Si l’on se projette, quelqu’un comme Nicolas Sarkozy aurait tout intérêt à être premier ministre” B. François le 28 octobre 2011

Bastien François, inaccessible ? Son cv impressionnant pourrait le laisser penser : il dirige actuellement le département de science politique à la Sorbonne, enseigne et se trouve être un spécialiste de sociologie politique et de droit constitutionnel. Par ailleurs, il est conseiller régional en île de France sous l’étiquette de EELV.

L’histoire de Bastien François avec la 6e République commence en 2001 avec le fameux projet C6R, convention pour la 6e République avec Arnaud Montebourg et Guy Birenbaum (entre autres). Vous aurez remarqué que les chiffres romains ont été balayés comme si l’on s’affranchissait du passé et que l’on s’inscrivait résolument dans une modernité. Un symbole. Lors de son engagement auprès d’EELV, lui et quelques autres se mettent à imaginer une 6° République écologique. C’est au sein de la fondation pour la nature et l’homme de Nicolas Hulot que se concrétise ce postulat, et un livre est sorti “Pour une 6° République écologique”.

D’emblée, Bastien François, lorsque j’aborde la 6e République, me répond de manière politique. Ce projet est au loin, les négociations entre EELV et le Parti Socialiste ne portent pas sur ce sujet. Il s’agit plus de tractations sur un aménagement de la Ve République. Ce dont j’avais envie, c’était que Bastien François se lâche, me décrive le projet rêvé, son utopie, sans contraintes, ce qu’il aurait bâti s’il était aux commandes. Certaines choses restent à définir, bien entendu mais la base est là, portée en grande partie par le travail collectif du livre.

“Le monde, les relations sociales ont changé. L’accès généralisé aux études supérieures, l’ouverture des horizons géographiques, l’info largement diffusée ont contribué à bouleverser notre société. Ajoutez à cela le phénomène de la précarisation. Incroyablement, le seul truc figé c’est la politique. On reste avec des politiques qui infantilisent les électeurs, finalement. Sans compter une défiance vis-à-vis des jeunes, qui, eux sont de plus en plus angoissés. La Ve république, finalement, c’est la grande messe tous les cinq ans et pendant ce laps de temps, les électeurs n’ont quasi aucun droit. J’ai envie d’une exubérance démocratique. C’est ça la 6e République pour moi.”

Abattre les murs, sortir la France politique de sa léthargie, bouger les lignes, Bastien François s’y emploie concrètement en tant que conseiller régional. Il a institué “un droit d’interpellation populaire” permettant aux Franciliens de saisir par voie de pétition les élus régionaux. Je n’en savais strictement rien. Il suffit d’une pétition réunissant 50 000 signatures et on peut y participer dès l’âge de 16 ans. À l’évocation de cette victoire, Bastien François aura un sourire fier. Pour lui, l’important, c’est de trouver des outils pour que les politiques fournissent des réponses “au quotidien” aux questions que se posent légitimement les électeurs, des moyens pour faire surgir des problèmes qui n’émergent jamais du fait que les politiques sont probablement trop éloignés des Français.

“Je trouve aberrant que, dans ce pays, certains partis ne figurent pas au sein de l’Assemblée. La proportionnelle, peut-être pas en totalité mais partielle est indispensable. Comment voulez-vous répondre aux électeurs du Front National s’ils ne sont pas représentés ? Une assemblée nationale où il n’y a pas d’élus FN n’a pas de sens. Par ailleurs, il faut cesser le cumul des mandats, créer un turn over au sein de la politique. Pour que la démocratie fonctionne, il faut que les pouvoirs nous échappent en quelque sorte.”

Vous trouverez ci-dessous des schémas, certes imparfaits, pour expliquer les mécanismes de la 6° République rêvée de Bastien François. A la base, on trouve une constituante 2.0. Pour l’instant, par manque de moyens financiers et techniques, cette idée est au point mort. Sur la base de ce qui s’est fait en Islande sur le G1000 en Belgique, instaurer un débat entre citoyens pour déterminer quelles sont nos valeurs, qu’est-ce que la démocratie, qu’est-ce que la politique. Finalement, à contrario du débat sur l’identité nationale, ne pas déterminer ce qu’est qu’être français, mais ce qu’est la France, du moins, ce qu’elle représente et comment fonctionne-t-elle ? Un forum, des débats filmés et retransmis seraient les supports par exemple. Tout est possible. À noter que comme le racontait Lara Orsal, on pourrait très bien se servir du système Freemen. On pourrait imaginer qu’une série de recommandations émergeraient. Tout ceci constituerait une base de discussion générale.

Au chapitre proprement dit d’une 6e République : les électeurs se prononceraient sur le choix des députés et sénateurs ainsi que le Président de la République : “Le rôle du Président serait non pas exécutif mais il serait en quelque sorte un garant. Le garant des valeurs que nous choisissons, et son pouvoir s’inscrirait sur le long terme, un genre d’arbitre avec une capacité à saisir les institutions. On peut imaginer que cela soit un prix Nobel par exemple, une figure emblématique. Ce ne serait pas forcément un homme politique. Le mandat ne serait pas de cinq ans mais plus long de façon à ce qu’il ne soit pas dans le même tempo que le parlement. Un décalage nécessaire pour un travail sur du long terme.”

Le rôle de l’exécutif serait confié au Premier Ministre et au gouvernement : “Si l’on se projette, quelqu’un comme Nicolas Sarkozy aurait tout intérêt à être premier ministre plutôt que Président au sein de cette 6° République.

La notion de grands électeurs disparaît : “Ils savaient parfaitement ce qu’ils faisaient en créant le Sénat et son système : c’était forcément un vote conservateur à l’époque. Le sénat a changé, le monde a changé. Si l’on pousse plus loin, la philosophie des Lumières n’avait pas prévu la profonde transformation du monde par les humains.

Le parlement serait composé de trois chambres : l’assemblée nationale représentante du peuple, le sénat représentant les régions (Une très grande décentralisation est nécessaire), et la troisième chambre, elle, représente la société civile et se pencherait sur les conditions naturelles de vie : “une nouvelle chambre parlementaire dédiée aux enjeux environnementaux, l’«Assemblée du long terme», composée de personnalités qualifiées et de citoyens tirés au sort. Sa légitimité ne repose pas sur le principe représentatif, mais sur sa capacité à se dégager du court terme. Préserver la biodiversité ou la stabilité du climat sont des objectifs à caractère universel et non des intérêts catégoriels. Le problème n’est donc pas de représenter tels intérêts contre tels autres. En conséquence, cette troisième chambre ne vote pas la loi, dans une délibération où s’affronte fatalement ce type d’intérêts. Elle peut uniquement, en amont, concevoir et proposer des projets de loi liés au long terme, comme la refonte du système fiscal favorisant une économie économe de ses ressources. En aval, elle dispose d’un droit de veto constructif sur les lois avant leur promulgation, qui contraint les assemblées à délibérer à nouveau. Son pouvoir consiste avant tout à injecter dans le débat parlementaire la préoccupation du long terme, à imposer justement qu’on en débatte.” (source Libération). Pour l’instant, il reste à déterminer comment et qui les choisirait, à priori, ce serait une des attributions du parlement.

Une chose à laquelle Bastien François tient beaucoup c’est la notion de débat et de contradiction : “Le conflit est perçu comme quelque chose de négatif. Regardez les réactions quand au sein d’un parti des voix dissidentes se font entendre. Tout de suite, c’est le drame. La grille de lecture concernant le conflit est exacerbée alors que la confrontation d’idées contradictoires est saine pour une société. Le délibératif est une des solutions.” Pour cela deux leviers : le véto constructif et l’expression d’opinion contradictoire encouragée. Il y a de nombreux partis en France, et avec la proportionnelle, si l’on positionne l’opposition parlementaire en “la renforçant dans sa fonction d’interpellation, dans sa capacité à mobiliser des instruments de contrôle, d’investigation et d’évaluation des politiques publiques, vous créez un véritable espace délibératif parlementaire”* (Page 12 de l’ouvrage « Pour une 6e République Ecologique« ). Le débat démocratique doit rester en permanence vivant.

Le Conseil Constitutionnel ne serait plus composé d’anciens Présidents ou désignés par le même système. Les présidents des chambres proposeraient des candidats. Ils seraient auditionnés par le parlement et élus par lui. Une qualification technique serait nécessaire pour ses membres afin que cette institution fonctionne pleinement.

Toutes ces réformes, y compris celles du scrutin “seront incapables de corriger les effets de ce que Robert Michels, au début du XXe siècle, a appelé “la loi d’airain de l’oligarchie”, qui saisit toutes les organisations y compris les plus démocratiques : reproduction endogamique et concentration du pouvoir au sein de la classe politique. D’où la nécessité de favoriser l’accès aux mandats et la rotation de leurs titulaires.(…) C’est sous la Ve République que la proportion des cumulants a connu une progression considérable (en 1988, 96% des députés sont des cumulants). (…) La suppression stricte du cumul avec l’instauration d’un mandat unique serait bien comme l’a dit Guy Carcassonne, la « mère de toutes les réformes ». Il faudrait la compléter par la limitation dans le temps de l’occupation d’un mandat afin d’obliger à une véritable rotation ».* (Page 76 de l’ouvrage « Pour une 6e République écologique« )

Ce qui compte pour Bastien François finalement, c’est que le dialogue, voire le conflit ait lieu : “Créer le débat et donner du temps voilà le nouvel enjeu de la démocratie finalement. Et de la compétence grâce à l’intervention de la société civile. Pour autant, je suis sans illusions, cette 6° République naîtra sur un coup de force ou sur une circonstance historique. Les actuels politiques sont un microcosme parisien. Ils se connaissaient tous. Michel Rocard, pour répondre brièvement à sa tribune dans le Plus du Nouvel Obs, était mon héros auparavant. C’était un type extrêmement moderne. Mais il est comme les gens de cette génération, comme mon père, il vieillit et la politique est à un tournant majeur. Regardez la résolution de la crise européenne : Angela Merkel s’est rendue tous les jours au Parlement, elle a discuté, dialogué. Nicolas Sarkozy l’a joué tout seul. Aucun débat n’a eu lieu. C’est une vision obsolète du pouvoir.”

Bastien François sourit quand il me raconte que, la plupart du temps, les politiques le prennent pour un fou : “Je vais dans le sens de l’histoire. J’aimerais si je dois laisser une trace “sociale” de mon existence qu’elle soit liée à la 6e République. C’est le projet d’une vie dont je ne verrais peut-être même pas la naissance. Mais ce n’est pas grave. Ce qui compte, c’est d’en faire partie.

Je l’interpelle sur une toute petite chose qui me travaille, et qui me semble symbolique de la Ve République : les titres religieux du chef de l’État, vieille réminiscence de la royauté, proto chanoine, chanoine honoraire, etc. « Je ne les conserverai pas » me dit-il. J’en suis satisfaite car je crois une coupure nécessaire avec cette tradition qui n’a plus de sens. D’ailleurs, notre seul désaccord avec Bastien François sera sur la laïcité. Il voit tout à fait l’utilité de redéfinir ce qu’est la laïcité de nos jours, pour moi, la loi de 1905 et ses ajustements sont largement suffisants. Une autre question brièvement abordée sera celle de la loi en France. Je ne sais plus qui en a parlé mais fort du principe que nul n’est censé ignorer la loi dans ce pays, il me semble ahurissant qu’une refonte du code civil et pénal, ne parlons pas de l’administratif ne soit pas envisagée. Bastien François veut bien y réfléchir mais il n’a qu’un seul objectif : la 6e République, écologique de préférence.

Instaurer grâce à des institutions une exubérance démocratique, c’est cela le but de Bastien François. Je rajouterai pour ma part que la France est un grand pays, patrie des droits de l’homme et de ce qui s’approche le plus d’une démocratie. Mais tout cela a été dévoyé. Nous sommes en oligarchie. Ce que je trouve formidable avec le projet de Bastien François et de ses compagnons de route, c’est que si la 6e République était instaurée, la France aurait réinventé la démocratie au sein du XXIe siècle. Les possibilités pour les citoyens de participer existent, ce qui n’était pas forcément le cas auparavant. Il faut s’adapter. Les taux d’abstention sont parlants, on élit un “roi” et les “états généraux” et on s’en détourne aussitôt. Afin de donner un coup de fouet, il faut faire bouger les lignes dans les institutions pour restaurer la confiance auprès des électeurs. Ce ne sont pas les partis qui sont en cause quelque part mais le système lui-même, un système qui n’affronte quasi aucune contradiction politique. La présence de la société civile serait un des moyens de les déclencher. Par ailleurs, le temps de la politique telle qu’on l’a connue, une politique du court terme est terminée. Les enjeux sont colossaux, l’humanité a appris au cours du XXe siècle que son monde avait des limites, des limites en terme d’écologie et en terme de systèmes économiques et politiques. Réinventer la démocratie est impératif ; la 6e république en est l’incarnation pendant que la Ve n’en finit pas d’agoniser…

Pour une 6e République écologique » sous la direction de Dominique Bourg aux Editions Odile Jacob
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@Catnatt – Paris – 14 novembre 2011

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C. Lepage, écologiste sincère ou mercenaire libérale ?

C. Lepage est députée du parlement européen, elle appartient au groupe libéral ALDE. Elle fut ministre sous le gouvernement de droite d’A. Juppé de 1995 à 1997 ; aux élections régionales de 2004, elle se présente sur la liste de l’UDF d’A. Santini. Puis à la tête de son parti CAP21, elle intègre le MODEM de F. Bayrou en 2007. Pour claquer la porte après la débâcle des régionales de 2010. Ensuite, elle se rapproche de la nébuleuse Europe écologie. Un parcours qui ressemble à du nomadisme politique. Elle revendique une approche ni droite, ni gauche. Une posture paradoxale comme l’illustrent ses choix. En particulier sur l’influence des lobbys et le libéralisme. De ce parcours, on ne peut retenir que les écueils, car il y a aussi des prises de positions fortes. Mais jusqu’où peut-on, malgré un engagement citoyen manifeste et une réelle acuité, louvoyer dans cet environnement politique et rester crédible ?

Technocratie et Lobbyisme
Immergée dans les rouages de la citadelle technocratique Europe, C. Lepage décrit un fonctionnement formaté, aseptisé loin de possibles débordements. Elle se plait ainsi à décrire les turpitudes de ses petits camarades facilement convaincus par les lobbys. Qui recyclent docilement les amendements déjà rédigés. Pas de noms. En ce qui la concerne, elle déclare ne pas céder aux groupes de pression quels qu’ils soient. Une attitude transparente et démocratique comme elle le stipule sur son blog. Mais pas à une contradiction près, C. Lepage approuve l’omniprésence des lobbyistes à Bruxelles, « Ils font parti du jeu démocratique ». Une perspective quelque peu étonnante, qui laisse plus entendre un fatalisme désarmant face aux institutions et leur fonctionnement opaque, plutôt qu’un réel engagement pour une Europe démocratique, des peuples. En effet que pèse le vote citoyen distant, face au travail de proximité des multinationales. La tarte à la crème des « européistes » consiste à mettre en avant l’influence des ONG (moins de 10%) qui font aussi parti des dits « lobbys ». Ainsi, la directive REACH est inlassablement mise en avant pour souligner l’influence de la WWF. Tactique habituelle de l’arbrisseau masquant la forêt des intérêts très particuliers des plus puissants. Cela rappelle les publicitaires qui minimisent l’impact de leur propagande.
Les lobbyistes à Bruxelles doivent s’enregistrer auprès de praticiens des « public affairs ». Un code de conduite mode éthique libérale est instauré. Décoratif et non contraignant. Dans ce cadre de gentleman prime l’autorégulation. À l’européenne.
Quand par chance l’ignare populace européenne a droit au chapitre et s’exprime de façon démocratique (vote) sur l' »Europe », sa décision est mise en attente et repassée au scrutin jusqu’à aboutissement du point de vue « correct », c’est-à-dire de l’acceptation (France, Danemark, Irlande, TCE, Lisbonne). La route est longue et étroite entre le citoyen et ses représentants continentaux. Il n’en est pas de même pour les 10 000 techniciens en directives employés pour servir les intérêts minoritaires et spécifiques qui influent au plus haut de la structure technocratique. C. Lepage milite pour la responsabilité du politique. La reprise en main des leviers économiques face au dogme libéral et à la puissance des intérêts particuliers. C’est ce qu’elle déclare. Aussi. Dans quelle mesure cette réappropriation passe-t-elle par une remise en cause de ce petit arrangement de sommets sous couvert d’assentiments démocratiques ?

Sur le plan national, elle considère le Grenelle II comme une reculade. Déclarant par exemple que le gouvernement a cédé au sujet de l’énergie éolienne sous l’influence d’EDF. Et probablement du lobby nucléaire. Ces fameux lobbys dont on loue la nécessité démocratique.

Une « antilibérale » dans un parti libéral

G. Verhofstad fut surnommé Baby Tatcher. Il dirige le groupe ALDE au parlement européen. Il suffit de l’écouter s’exprimer sur les politiques économiques pour se convaincre de son attachement au versant le plus rigoriste du libéralisme économique sauce eurocratique. Le FDP allié droitier de la CDU en Allemagne appartient au groupe ALDE. Seules différences avec le PPE conservateur, il est plus libéral économiquement (c’est possible), et moins raide sociétalement (élémentaire). Le groupe ALDE fait la bascule selon les votes avec le PPE conservateur ou les verts et sociaux-démocrates. C. Lepage déclare s’exprimer en totale indépendance hors consignes de vote, « on me demande seulement de prévenir avant ». Son objectif, faire avancer l’Europe sur les sujets écologiques. Cruciaux. Certes, mais comment concilier les dogmes du consensus de Washington qui inspire le catéchisme du groupe ALDE dans sa vision économique du développement, et les impératifs écologiques nécessaires à une révolution des mentalité. Le libéralisme n’a que faire du fardeau écologique. Il s’en sert au mieux comme d’une vitrine marketing pour faire passer ses prérogatives (greenwashing). Une vitrine marketing dont C. Lepage fait peut-être partie ? Du moment que cela n’entrave pas les échanges internationaux, la circulation du capital et l’accumulation des profits. L’idée même d’une taxe écologique hérisse les libéraux. C’est assez interloqué que l’on peut l’entendre déclarer : »On a un parlement très libéral, en terme de liberté publique c’est très bien, en terme économique c’est très mal ».
C’est aussi avec une grande acuité qu’elle décèle les nouvelles cibles du néolibéralisme. Quand un adepte de F.v. Hayek lui parle de la société post-moderne comme « la société de la peur », elle en tire une conclusion limpide. L’étape suivante du projet libéral est d’extirper du coeur de l’État la notion de sécurité. Rompre le contrat qui liait le citoyen et l’entité étatique. En substance, il abandonnait un peu de sa liberté et consentait à l’impôt pour vivre en relative sécurité. Selon C. Lepage, le dénigrement du principe de précaution, l’instrumentalisation des peurs n’ont qu’un seul objectif, reculer encore les frontières du « bien public ». Pour privatiser.

Insaisissable et paradoxale C. Lepage, qui prend le parti de se nourrir du système, mais aussi de le nourrir. Paroles radicales, approche iconoclaste qui accouchent de reforme(tte)s symboliques au sein d’un bloc idéologique qui n’a que faire du pragmatisme et de la bonne volonté. Vouloir se placer au dessus du clivage droite gauche c’est faire le pari que l’environnement politique le permet. Comme elle le remarque si bien, l’offensive néolibérale transforme tout, recycle tout à sa mesure. L’économie individuelle de la peur est devant. C. Lepage compte-t-elle s’y opposer avec le gentil G. Verofhstad ?

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Vogelsong – 11 mai 2010 – Paris

E. Badinter, une journée de publicitaire sur France Inter

On met les petits plats dans les grands à radio France, N. Demorand tout miel dans la matinale joue l’écolier candide face à la figure tutélaire du féminisme français. Pour E. Badinter, la voie est libre pour exposer sa vision de la femme, de la modernité, du Bien. Derrière les doléances habituelles et justifiées du combat féministe, inégalité de traitement, flexibilité, elle profite du créneau pour distiller une vision très conservatrice de la société. Elle affirme à juste titre que les femmes sont les premières victimes de la crise. Mais bien qu’exact, ce constat est lacunaire. On ne peut parler de la crise sérieusement en abordant seulement ses conséquences. Car les causes sont bien trop encombrantes. Cette publicitaire est légataire d’un vieux monde qui refuse de rendre les armes. Celui de l’exploitation symbolique des femmes, de la consommation comme mode de vie, du gaspillage comme habitude.

Une invitée de marque

E. Badinter est à la tête du conseil de surveillance de Publicis, quatrième groupe mondial de communication. Le groupe dont le chiffre d’affaires 2008 s’élève à 4,5 milliards d’euros. Moteur du capitalisme consumériste, les transnationales de la communication se repaissent de l’idée de croissance infinie. Pour E. Badinter et ses semblables, la crise s’apparente à un accident de parcours qu’il faut surmonter. Ancrée dans le paradigme de la fin XXe siècle, il est impossible à cette caste, enfants d’E Bernays, de penser autrement. La publicité massivement pilonnée est la seule manière de refourguer des babioles inutiles à des consommateurs qui n’en ont pas besoin. L’activité des groupes de communication comme Publicis ne s’arrête pas à la force de vente pour colifichets superflus. Lobbying et communication font partie de l’arsenal des prestations. Quand un groupe pétrolier veut verdir son image, il fait appel à une entité telle que Publicis pour lui servir un “wording” et un argumentaire qui lui permettra de lisser son profil public. Elle pourra continuer de polluer la biosphère avec un label “greenwashé”. Quand une multinationale du tabac en proie à une législation sanitaire veut continuer à toucher un public jeune par exemple, elle mandate une agence de communication pour échafauder une stratégie d’infiltration de ce segment de marché.

L’écologie, cet asservissement

Quand on parle d’écologie, E. Badinter conçoit, bouche pincée, qu’il “faille un peu changer ses habitudes”. Un peu. Que cela soit pour des raisons de survie, ou d’hygiène globale l’approche écologique devrait normalement s’imposer. Renoncer à l’économie du gaspillage, de l’accaparement et du bâfrement pour une minorité constituerait l’ébauche d’un progrès. Pas pour une publicitaire qui vend des livres parlant de femmes. Car elle a trouvé ses cibles. Les “naturalistes”, ces immondes sauvages empêcheurs de gaspiller en rond. Points focaux de sa critique, l’allaitement, les couches lavables, la nourriture bio. C’est doctement qu’elle raillera C. Duflot, avec l’aide complice de N. Demorand sur la nourriture pour enfants, préférant les petits pots industriels aux “brocolis bios”. Si la vérité se niche dans les détails, ces derniers sont troublants. Car l’asservissement des femmes est aujourd’hui le fait des nouveaux naturalistes qui imposent des habitudes de consommation et un mode de vie plus continent. Argument ultime, “ils”, entendre les écologistes, font passer la nature avant la femme. On pourrait s’étendre indéfiniment sur ce type d’allégation, mais elle met en relief une chose, pour E. Badinter la femme surpasse la nature, et elle n’en fait pas partie.

Une critique aveugle

Par contre, elle fait naturellement partie de l’univers publicitaire. Mythologie de la femme-objet, de la femme-produit pour écouler toutes sortes de colifichets. Publicis, par exemple, est l’origine d’une campagne mettant en scène une femme et ayant pour slogan “mon banquier me préfère à découvert”. Exemple ponctuel ? Évidemment pas. Le monde de la publicité fonctionne essentiellement sur le motif libidinal. Les références sexistes mettant en scène le désir avec des femmes utilisées comme objet de convoitise sont pléthores. Mais la ménagère revient aussi en force, J.M. Teyssier du BVP déclarait “voilà que la femme retrouve dans la publicité un rôle qu’elle maîtrise à merveille pour l’avoir pratiqué des siècles durant, celui du petit être, ravissant et fragile, futile et désarmé, qu’anoblissent pourtant les nobles responsabilités de la maternité et de l’éducation des enfants”. Le monde de la publicité en interne comme en externe est éminemment sexiste. Et dans ce métier, les faux culs sont légions, J. Séguéla sans complexe déclare “l’absence de femmes est liée – paradoxalement – à leur qualité de maturité, à leur recherche de stabilité, de sécurité”, mais la profession compte 65 % de femmes, le problème vient de la cooptation masculine et des stéréotypes véhiculés mettant en avant “de grands gosses attardés, joueurs et immatures”. Résultat : faible féminisation parmi la direction créative. D’ailleurs un cacique du métier, N. French déclara “s’il existe si peu de femmes directrices de création, c’est tout simplement parce qu’elles sont trop connes”. Il fut viré. Mais cela reste un angle mort de la profonde réflexion d’E. Badinter. Elle préfère vitupérer grâce aux bons soins d’une radio d’État sur le retour à la sauvagerie des langes.

La chaîne publique se lance dans un programme publicitaire au profit d’E. Badinter. Elle a pu y promouvoir son dernier ouvrage la journée durant. En rang d’oignons, les journalistes de la rédaction ont fait circuler les plats chauds. Questions gentillettes, temps de parole élargi et sans coupure. Seules les apostrophes d’auditeurs ont sorti ce beau monde d’une torpeur usante. Que vaut autant d’attention à une philosophe révolue ? Hormis ressasser les généralités féministes, elle s’est trouvé un créneau étroit, une niche économique pour y promouvoir ses thèses antiécologiques et conservatrices. Et aussi refiler son bouquin. Sous le vernis c’est un féminisme publicitaire de marché qui se cache. Mettant à son profit l’espace médiatique que son envergure lui permet pour que rien ne change dans l’ordre économique du monde. Sur France Inter, il est grand temps de consacrer une journée entière à V. Despentes.

Sources :

Marie Benilde – « On achève bien les cerveaux » ed. Raisons d’agir

Articles connexes :

Rue89 – Elisabeth Badinter, actionnaire féministe d’un Publicis sexiste ?

Le plafond de verre – Elisabeth Badinter encore

P. Carles – (video)  Le couteau électrique

C. Duflot & E. Badinter –  (Video) Twitter

Vogelsong – 12 février 2010 – Paris

Béatitude écologique en milieu tempéré

Un unanimisme béat frappe la planète. La production du consensus mou tourne à plein régime. Il n’est pas un parti, une organisation, une personnalité en vue qui ne pratique pas le « greenwashing ». Ce spectaculaire exercice de funambulisme consistant en dépit du bon sens, des réalités et surtout de ses propres pratiques à arborer une posture écologique. Les intérêts économiques ont colonisé l’espace environnemental pour en faire une machine émotionnelle. Le summum du « politicaly okay ».

La politique comme activité sérieuse de gestion de la Cité dans le sens du progrès impose un minimum de cohérence. Une denrée rare en cette période de bouillie idéologique. L’administration en charge de la France est capable en un court laps de temps de prétendre une chose (la réforme), son contraire, et l’impossibilité de changer quoi que soit. En l’occurrence, J. L. Borloo, VRP froissé de l’écologie, ministre phare du casting de N. Sarkozy, évoquait l’impossibilité d’exploiter infiniment une planète finie. Des propos pleins d’emphase dans la bouche d’un homme de droite qui présage d’une prise de conscience salutaire. Dans la foulée, les ministres en charge des affaires économiques et sociales, C. Lagarde, L. Wauquiez, guettent, saisis d’une angoisse non feinte, des chiffres positifs relatifs à la croissance économique. La fameuse croissance fondée sur la consommation et le gaspillage, son tropisme connexe. Enfin C. Jouanno secrétaire d’État chargée de l’écologie, déclare à C. Duflot lors d’un débat « le monde n’est régi de manière contraignante que par une seule règle, la liberté du commerce et de la concurrence », en introduisant la tirade par sa rétivité à légiférer, préférant l’incitation. Dans la kyrielle de déclarations issues d’un organe unique, le gouvernement, il est intéressant de faire la synthèse sur le sujet. Et en tirer une conclusion spécifique : l’adaptation du discours au contexte et à l’auditoire. En l’occurrence, surfer sur la vague verte. Et en tirer une conclusion générale : la totale ineptie du propos général et de la vision politique. L’impossibilité d’agir sérieusement sur l’environnement. En effet qui pourra démontrer que dans un univers ligoté par la concurrence, le libre échange donc le profit infini comme seul horizon, la planète finie puisse être sauvegardée grâce à des mesures incitatives ? Ce même gouvernement qui n’a pas réussi à inciter les restaurateurs à modérer leurs tarifs après un cadeau fiscal. Un écueil domestique retentissant qui peut préfigurer l’inefficacité à l’échelle planétaire. Un schéma que l’on retrouve aussi au niveau international avec le FMI (la croissance), les sommets écologiques (bla-bla), et les bilderberg (la concurrence comme seul horizon).

La sauvegarde du globe a aussi ses croquemitaines. Figures repoussoirs, mais « sérieuses », qui tendent plus à discréditer un discours dissonant qu’à apporter de la matière au débat. L’idiot utile en l’espèce, C. Allègre, Jospinien à ses heures, mais surtout traître patenté joue exactement la partition entendue. Rien de ce qu’il pourra dire ne sera jamais plus pris au sérieux. Ses sorties confinent au grotesque, et ne font plus de lui un partenaire crédible. La stérilisation de la pensée critique s’illustre dans le flop du climatgate. L’adhésion instinctive d’une population qui ne doute plus. Pourtant, l’affaire aurait dû faire du bruit. Dévoiler la fraude statistique à grande échelle sur l’inexactitude du réchauffement climatique ne soulève plus de questions. L’assentiment est intégral. L’abêtissement aussi. On aurait dû se déchirer sur ce sujet si important. Fouiller jusqu’à l’épuisement pour faire sortir la vérité. Cela n’a pas été le cas tant le matraquage a ramolli les cervelles.

Du côté des grandes sociétés polluantes, il ne reste plus que des réminiscences de résistance à la vague verte. Quelques-unes se sont essayées à la promotion des émissions de CO2, prenant la photosynthèse en exemple, « Le CO2 n’est pas polluant ». Tellement ridicule et insignifiant que cela en est troublant. Voire suspect.

Derniers soubresauts des gargantuesques industries pétrolières face à l’urgence climatique ? À ce niveau d’intérêts économiques, on ne baisse pas pavillon. On ne laisse pas non plus des inexactitudes statistiques dans la nature. On colonise les esprits, on accompagne, on enveloppe le mouvement. Ces dernières années les dépenses ont été faramineuses chez les industriels pour mettre en place une communication efficace et verte.

N. Chomsky le fait justement remarquer dans « comprendre le pouvoir »* en prenant l’exemple de l’apartheid en Afrique du Sud, de la guerre du Viet Nam ou des mouvements civiques aux USA. Le capital sait se retourner pour prendre le vent. Tant que cela sert le business. Et dans chacun de ces cas les bonnes causes suivent les dividendes et les projets industriels.

Toutes les sociétés participent au greenwashing en investissant sur l’image de la marque. Total, par exemple fait la promotion de l’écologie et de comportements sociétalement et environnementalement responsables, s’inscrivant dans un pacte mondial (voir site). Un mélange d’écologisme et de « droits de l’hommisme » à la guimauve que personne de sérieux ne peut croire. Car le nerf de la guerre, la focalisation de toutes les énergies, c’est le cash et le cours de bourse. Le reste, pour la galerie. Ornée de vert.

Les pantins télévisuels que l’on finance à coup de millions d’euros les y aident parfaitement. Show puéril pour public gavé de TV. Le spectateur en redemande et certains partis politiques aussi.

Mais en réalité, les émissions de gaz à effet de serre n’ont jamais été aussi élevées et ne cessent de croitre (+3% entre 2005-2006, +30% entre 1990 et 2006). Paroxysme schizophrène, les experts se félicitent de l’augmentation de ventes d’automobiles. Le signe de la bonne santé économique. L’indice de consommation et son corollaire, la prolifération d’emballages et de déchets renseignent sur le « moral » des ménages. Des contradictions insurmontables au mode de gestion actuel. Le cycle infernal. Le grand écart entre communication et réalité.

A Copenhague, selon les commentateurs les manifestants ne grognent pas, ne râlent pas, ne nuisent pas au bon déroulement de la vie quotidienne des résidents consommateurs. Enfin si. Quand la police un peu zélée aligne les jeunes turbulents en rang d’oignons, on prend l’air offusqué. Les médias intègrent le discours culpabilisant sur le climat. Ils dépeignent ces démonstrations comme pacifistes, « bon enfant », une « marée bleue » entend-on. Pas un E. Zemmour ou un Y. Thréard pour fustiger ces archaïques crasseux qui encombrent les rues. Avant le vingt heures c’est une ribambelle de réclames pour produits écologiques, pendant ce sont les images brutes de calottes glaciaires qui s’effondrent, des fumées bistres d’une quelconque usine dans un quelconque pays. Aucune explication, aucune causalité directe, ni de remise en cause de l’ordre économique et social. Car ce serait parler de la domination d’une oligarchie planétaire néolibérale. Une domination à la source du désastre. Mieux vaut fusionner comme un bienheureux dans la pensée molle et mitigée de l’écologie du moindre effort. Dont le leitmotiv pour participer au happening pourrait être : « Arrêtez le robinet d’eau lors du brossage dentaire ».

*N.Chomsky p. 168 « Comprendre le pouvoir » – Ed. Aden

Vogelsong – 14 décembre 2009 – Paris

Cache-misère écologique

D.Cohn-Bendit a su épouser avantageusement les bienfaits du capitalisme, de la croissance et de la soupe médiatique. Un hochet parfait pour l’éviction des questions sociales en temps de crise. Il réussit, pour le plus grand bonheur de la bureaucratie bruxelloise, à faire croire que la problématique écologique est enfin prise au sérieux, en escamotant les ravages de la dérégulation économique.

ecoLa méthode de diversions a fait ses preuves. On trouve toujours d’excellentes mauvaises raisons pour passer la question sociale par pertes et profits. Les socialistes ont défriché le terrain lors de la débâcle de 1984. Pour assumer le tournant libéral, l’intelligentsia mitterrandiste se vautra allègrement dans les thématiques consensuelles. Incapable de tenir ses promesses égalitaires. Impotentes face à la révolution néo-libérale qui se dessinait, la gauche au pouvoir trouva des dérivatifs. Cache-misère du progrès social, ils vont consacrer toute leur énergie à des causes, certes valables, importantes, justes, mais en les surreprésentant par rapport au projet initial, l’égalité, le social. On ne lésina par sur la communication et les discours emphatiques. Le résultat est glorieux. La gauche court après le temps perdu et sa crédibilité après 20 années de trahisons. Les conservateurs, plus plastiques et opportunistes ont depuis avantageusement pris le tournant sociétal par des effets d’annonces et une politique de casting bien pensée.
Aujourd’hui, l’écologie prend la même pente. Elle est le paravent idéal à la crise qui vient. Le monde globalisé voit l’explosion sidérante du système financier, il attend les ondes successives, assourdissantes. On ne pourra rien pour les plus faibles. Les artifices verbaux tels que « la moralisation du capitalisme » vont rapidement rencontrer leurs limites dans le monde physique. Alors, il faut penser nature, écologie.
Dans chaque organisation politique, une officine dédiée à l’environnement voit le jour. L’UMP n’est pas en reste. N.Kosciuzko-Morizet occupe le terrain. Aux présidentielles, elle est la caution écologique du candidat des industriels. Ensuite elle organise la tartufferie bien nommée « Grenelle de l’environnement ». La poupée diaphane continue d’arpenter les plateaux pour y prêcher avec son pointu accent versaillais, « une révolution écologique ». Elle fait même oublier, des fois, qu’elle fréquente le même parti que P.Devedjian, dirigé par le replet X.Bertrand.
À la manière des multinationales par l’entremise des publicitaires, les partis politiques ont colonisé un espace qui leur était inhospitalier. En effet tous prônent la croissance. Attendent avidement son retour. Ne pouvant s’opposer, ils s’approprient les codes. La firme Total voyant son image se dégrader a, de son propre chef, financé des campagnes d’actions visant à soutenir des fondations pour la biodiversité. Ce qui compte ce n’est pas ce que l’on fait, mais l’image que l’on donne de ce que l’on fait.
Au soir des élections européennes, R.Dati lança à Europe écologie « nous pouvons faire de grandes choses ensemble« . Aurait-elle lâché la même chose si le front de gauche avait réalisé un score de 18% ?
Toujours prompt pour évacuer la question sociale, le monde médiatique fait son beurre de la souffrance de la terre. Pour les écologistes français de juin 2009, les astres sont propices. La séquence hebdomadaire pré électorale laisse pantois. D.Cohn-Bendit occit F.Bayrou sur une question concernant ses rapports avec le président Sarkozy. Dans la foulée la superproduction d’un photographe en goguette alarme l’hexagone du péril qui menace la planète. Hasard pur.

C’est en 1968 qu’émerge une grande figure de l’écologie. Le 8 avril est fondé le « Club de Rome« . Un mois plus tard, un pitre rouquin s’entiche des médias. Quarante ans plus tard, on en parle encore. Beaucoup. De l’association d’A.Peccei, il ne reste que la sombre réputation de Cassandre. Par amnésie et diversion, la technocratie s’affranchit toujours des sujets gênants.

Vogelsong -18 juin 2009 – Paris