Le libre-échange c’est la paix

« Le protectionnisme c’est la guerre ! » C’est en mode automatique que les laudateurs du libre-échange abordent la question du commerce international et de ses effets sur les peuples. La juste appréciation de la situation devrait conduire à repenser le modèle de développement, au lieu de prendre des postures.

42-21369547Dans le Landerneau économique, tout ce qui n’est pas libéral et libre-échangiste* est affublé de populiste. La seule réalité qui vaille pour l’économie est le modèle de la spécialisation d’A.Smith (1723-1790) et des avantages comparatifs (D.Ricardo 1722-1823). La modernité qu’incarne C.Saint-Étienne par exemple, conseiller du prince F.Fillon, repose sur des vestiges idéologiques vieux de plus de deux siècles. La question n’est pas d’éliminer a priori les potentialités du libre-échange. Dans certaines conditions, l’ouverture des frontières et la spécialisation ont un effet stimulant sur les économies en favorisant le développement.
« Impensée » actuelle, le protectionnisme indispose l’intelligentsia, incapable de juger froidement des effets de la globalisation sur la vie des populations. La raison en est limpide, cette catégorie fait partie de la minorité qui tire bénéfice de ce contexte. La remise en cause de tels préceptes entraîne au mieux la condescendance, au pire l’anathème sur le nazisme et le « va-t-en-guerre ». Le socialiste P.Lamy, éminent historien de l’OMC, pérore que la Seconde Guerre mondiale est le fruit du protectionnisme qui suivit la crise spéculative de 1929. Raccourcit lacunaire qui oblitèrent les événements historiques antérieurs à la dépression. Les guerres successives (franco-allemandes), les paix « ratées », les ressentiments nationaux ne sont pas ou peu débattus. En tout cas écartés lorsqu’il s’agit de traiter le sujet.
L’imposture idéologique se poursuit dans les diagnostics de la crise. La pensée molle qui est distillée dans les organisations internationales (FMI, OMC, Banque mondiale) continue de prôner une politique de l’offre. Selon ces « sachants », le manque de compétitivité est le problème principal de la stagnation voire de l’effondrement de certaines économies. C.Saint-Étienne déclare « Les gens préfèrent acheter un Volkswagen à une Peugeot, c’est là le problème« . On tourne en boucle dans la même logique, tel un rongeur dans sa cage. De plus, on affirme placidement que les krachs successifs sont dus à une pratique dévoyée du sacro-saint libéralisme. Hémiplégie idéologique, car la réalité est tout autre. C’est notamment oublier que la demande crée les débouchés, que les salaires servent à acheter des produits fabriqués. La crise des « surprimes » est le symptôme du dérèglement et d’une inadéquation entre ce que les populations veulent consommer, en cela bien accompagnée par la communication publicitaire, et ce qu’ils peuvent intrinsèquement acheter. Après 40 années de compétition acharnée et de compressions salariales, la capacité à écouler des stocks de marchandises (souvent inutiles) se trouve tarie. Pour continuer à faire fonctionner la machine à croissance, on a recours au crédit. Jusqu’à l’apoplexie.
La course économique effrénée sur des bases sociales asymétriques conduit inévitablement à la catastrophe planétaire. On a mis en concurrence les entreprises et les salariés du globe. S’organise le conflit de chacun contre chacun où les dégâts sont épouvantables. L’argumentaire selon lequel le libre échange a permis à des millions de gens de s’extraire de la pauvreté est une escroquerie de la « bien-pensance ». Tout d’abord, l’objectif des libéraux n’a jamais été de faire sortir de la misère les populations du tiers-monde, mais d’en exploiter les bras (et aujourd’hui les cerveaux) au moindre coût. Quand l’opportunisme se mue en humanitaire…D’autre part, on est loin des résultats idylliques présentés par les zélateurs du commerce mondial. C’est tout d’abord une vision partiale de la situation. L’amélioration des conditions de vie n’est pas le simple fait de l’accentuation des échanges commerciaux. Les transitions démographiques, l’alphabétisation ont aussi une part dans le décollage de certaines zones. Approche partielle, car on ne peut affirmer, sauf quand on est économiste-éditorialiste ventru, qu’aucun autre modèle de développement n’est possible hors du libre échange. Pourtant, on doit conjecturer sur les résultats d’une politique de régulation, hors des préceptes du consensus de Washington. J.Ziegler déclare : « Selon les tenants de cette théorie, seul un marché mondial totalement libéralisé et privatisé peut éliminer la faim et la malnutrition dans le monde. Les faits prouvent le contraire. La libéralisation et la privatisation ont progressé rapidement dans la plupart des pays au cours des dix dernières années. Dans le même temps, ceux qui souffrent de malnutrition grave et chronique n’ont jamais été aussi nombreux dans le monde« . L’état du monde « après » le libre échange n’est guère reluisant, toutes les 5 secondes un enfant meurt de faim (sur la planète, 857 000 000 de sous-alimentés en 2006, 842 000 000 en 2005)*.

Les mesures visant à réguler les flux internationaux sont d’emblée perçues comme des actes belliqueux. La communication libérale se drape dans l’harmonie et la pacification que produirait l’émulation économique. C’est une vaste plaisanterie qui ne fait plus illusion. L’économique internationale est essentiellement fondée sur le rapport de force. Dans l’économie de marché dérégulée, quoi qu’en dise P.Lamy, le plus fort broie le plus faible, impitoyablement. Un système général basé sur la cupidité, l’approche court terme, le chômage de masse, la baisse délirante des coûts, l’annihilation de son concurrent quel que soit le moyen, ne peut être qualifié de pacifique ou d’harmonieux ou même d’humain. Le libre-échange, c’est la paix ?

* »L’empire de la Honte » J.Ziegler
**sur le sujet l’intellectuel de l’UMP P.Devedjian se déclare « seulement » échangiste (sic)

Vogelsong – 12 février 2009 – Paris

31 réflexions sur “Le libre-échange c’est la paix

  1. Je trouve que c’est une critique un peu facile du libéralisme.
    D’abord, les pensées d’Adam Smith et de David Ricardo on été largement dépassées en science économique. Croire que les penseurs libéraux en sont restés là est caricatural.
    En plus, entre parenthèses, le libéralisme n’est pas la « bien-pensance » : en France, libéral est une insulte. C’est la pensée dominante en science économique, mais un discours minoritaire dans la politique.
    Ensuite, vous parlez du monde « après le libre échange ». C’était mieux avant peut être ? Le nombre de pauvres a augmenté, mais le ration par rapport à la population globale a fortement diminué. Le capitalisme est un système amoral, inégalitaire, mais qui crée tant de richesses qu’il propulse l’ensemble de la société vers le progrès. Comparez les pays de libre échange (occidentaux) avec les pays communistes et les pays en voie de libéralisation.
    Enfin, et surtout, la liberté économique est indissociable de la démocratie libérale. Libéralisme = démocratie + État de droit + marché libre. On ne peut pas enlever un des trois sans retomber dans les régimes autoritaires (qui peuvent d’ailleurs prôner le libre échange, comme quoi celui-ci n’est pas un absolu, c’est l’ensemble des institutions qui l’est).
    Bref, oui, le libéralisme, c’est pour l’instant la meilleure paix qu’on puisse trouver.

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  2. Beau billet mais survol un peu rapide du « phénomène protectionniste ». Le protectionniste n’est pas le fauteur majeur de WWII (l’étranglement de l’Allemagne après WWI a contribué largement à la soif de revanche allemande)n cela dit, le protectionnisme, avec son résultat premier: le taruissement du commerce et donc l’assèchement des revenus des pays impliqués, qu’ils soient protectionnistes ou cible du protectionnisme a conduit maintes fois à des conflits armés.
    Le nier est faire preuve d’aveuglement…
    Quant à ceux qui hurlent après ceux qui envisagent le protectionnisme, les deux devraient plutôt se poser la question de « la concurrence libre et non faussée » prônée par l’Europe.
    Il ne me paraît pas malsain de rétablire l’équilibre entre les pays qui pratiquent un dumping social et/ou fiscal, et les autres. On applique des sanctions économiques et l’embargo à des pays dont la politique extérieure ou intérieure est (semble ?) dangereuse pour ses voisins ou ses ressortissants.
    Pourquoi ne pas appliquer ces sanctions à des pays qui sont dangereux pour leurs voisins et leurs ressortissants faute de protection sociale, de code du travail…

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  3. La conclusion est restée « dans la tôle »:
    Ne pas confondre le protectionnisme et la lutte contre la concurrence déloyale. Personne, en termes de coûts salariaux, ne peut lutter contre des pays où l’entreprise a le droit de pratiquer un esclavage à peine déguisé.

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  4. @Gout des autres

    Oui le billet est lacunaire. C’est aussi le format qui veut ça. Tu m’excuseras donc pour les zones « impensées » de mon texte. ☺
    Concernant la WWII, je survole les causes. Je continue de penser que le protectionnisme est le symptôme du conflit de 1939, pas la maladie.
    Je ne peux que te renvoyer vers l’ouvrage d’E.Todd « après la démocratie » pour une approche détaillée et statistique du phénomène. Mon objectif est de faire passer l’idée. Le débat est ouvert.
    Il n’y a aucun malentendu sur le lien entre équités dans le commerce mondial, libre échange, régulation et protectionnisme. Dans mon esprit, le protectionnisme est une forme de régulation.
    Il faut aussi convenir que le commerce mondial n’est pas totalement ouvert, la PAC est un exemple frappant. Mais la tendance lourde est la privatisation et la libéralisation. Cela va de pair (Cf.Consensus de Washington, FMI). Les postures actuelles ne changent rien aux convictions profondes des « décideurs ». Quand la tempête sera passée, les zélateurs du « magic free market » reviendront nous exposer leurs visions et leurs recettes pour toucher la transcendance…

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  5. J’ai entendu E.Todd (avant hier je crois) sur France Inter. Il était beaucoup convaincant que lors d’autres interventions (il était même si emporté qu’il a sorti quelques énormités, c’est dire…)

    Que nos chantres du libéralisme ne baissent pas les bras, c’est certain, il s’agit quand même d’un gagne-pain plus que fructueux pour eux…
    Gagner sa croûte à la sueur du front des autres est quand même une perspective assez séduisante pour peu qu’on soit doté d’une bonne dose de cynisme… ;-)

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  6. @Paul
    Merci de passer par là. J’ai visité tes pages. Très intéressante.

    Je vais camper sur mes positions concernant Smith et Ricardo, sur le commerce mondial, c’est du « resucé ».
    Concernant la « bien pensance », c’est tout le problème de l’angle d’approche.
    Je crois que mot libéral n’est pas une insulte. Le libéralisme est vécu comme une violence, au quotidien. La bien pensance est représentée par 90% du monde politico médiatique et 90% du monde politique qui ne peut (ne veut) penser autre chose que le libre échange.
    Je te renvoie à la campagne sur le TCE, proportion de député pro, proportion éditorialistes pro et résultat final. Juché sur leur conviction ils savaient, eux… Tu ne peux nier que le libre échange et la libéralisation ont cristallisé le débat. C’est ce que j’entends par bien pensance. Le péquin de la rue qui subit de plein fouet les délocalisations et la pression exercée sur les salaires est très loin de ça. Ici la violence est directe.

    « Le capitalisme est un système amoral, inégalitaire, mais qui crée tant de richesses qu’il propulse l’ensemble de la société vers le progrès. »
    C’est du J.P.Raffarin ou du J.M.Sylvestre dans le texte. À part te dire que les bras m’en tombent… Un exemple précis de la rhétorique bien pensante.

    « Enfin, et surtout, la liberté économique est indissociable de la démocratie libérale. Libéralisme = démocratie + État de droit + marché libre. »
    C’est une vaste enfilade. Et je reste poli. Connais-tu l’Arabie saoudite et la Chine. Comment peux-tu soutenir de telles inepties, connaissant le monde tel qu’il est ?
    C’est de la communication.

    Intrinsèquement, le modèle libéral est liberticide. Pense au modèle de base du système, l’entreprise.

    « Bref, oui, le libéralisme, c’est pour l’instant la meilleure paix qu’on puisse trouver »
    Restons en là. Ne cherchons rien d’autre. Ce serait tellement dangereux…

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  7. « le libéralisme, c’est pour l’instant la meilleure paix qu’on puisse trouver » Euh, comment dire, combien de conflits armés, de guerres molles ou pas depuis la chute du communisme? Et dans ces conflits quel est le ratio civil/combattant, et surtout son évolution sur les 30 dernières années ?

    Et combien de ces conflits basés sur des problèmes liés à des matières premières et trafic rendus possible par absence de contrôle sur les échanges… Combien ? Tout ça n’a été rendu possible que la par la libéralisation des échanges et le concept d’état étant le responsable des problèmes (cf Reagan et ses amis).

    Et par politesse on ne parlera pas du rôle et du comportement des compagnies pétrolières US en Irak après la chute de Sadam.

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  8. Bonjour Romain (ça fait un bail ;) )

    Banco. Commerçons avec des règles ! (Pas celle de P.Lamy). Le protectionnisme en est une.

    Je précise : Le protectionnisme n’est pas le non-commerce.

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  9. @ Vogelsong :
    Pour la question du progrès, je n’ai fait ici que donner l’avis de ceux qui définissent le libre échange comme le meilleur système car le plus efficace. Ce que je ne fait pas. Pour moi le libéralisme est le meilleur système parce qu’il respecte les droits et libertés des hommes.
    Et je n’ai jamais dit que la Chine ou l’Arabie Saoudite étaient des démocraties libérales, au contraire ! J’ai justement fait cette remarque pour dire que le libre échange ne suffit pas à construire une société libre. La Chine a beau s’ouvrir au libre échange, elle n’en reste pas moins une dictature. Je ne soutiens pas non plus que la liberté économique amène l’État de droit et la démocratie (ma phrase pouvait être interprétée comme cela).
    Rien n’interdit de chercher autre chose, mais avant de l’avoir trouvé, ne scions pas la branche sur laquelle nous sommes assis !

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  10. Ce billet critique du libéralisme n’a pas vraiment de sens du fait que – tous les autres systèmes économiques – et ils sont très peu nombreux – ne s’étant singularisés que par leur vibrant échec – il est impossible de comparer le libéralisme à quoi que ce soit d’autre capable de créer des richesses. Le libéralisme étant le seul mode de création de richesse, il est impossible de perpétuer l’humanité en dehors de lui. Et quand il est évoqué les dégâts de la pauvreté créés par le libéralisme, il faut les mettre en parallèle des dégâts encore bien pire du collectivisme.

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  11. @Paul
    Je te suis gré de ne pas avoir cité le stalinisme. Et puis patatras c’est verhuit qui le fait. The point Godwin is near.

    Je me permets de revenir sur ton équation :
    Libéralisme = démocratie + État de droit + marché libre

    Tu peux remplacer Libéralisme et libre marché par à peu près n’importe quoi et faire tourner le tout. À l’infini.
    Ce qu’il faut démontrer après la soi-disante fin de l’histoire, c’est que libéralisme économique = démocratie. Et tu le pressens, c’est faux. Les politiques néo-coloniales dans le tiers monde, Suarto, La Chine et bien d’autres nous donnent un contre-exemple en live.
    De plus, je n’ai pas abordé les aspects psychologiques, ni environnementaux.

    Le Monde et l’impossibilité des « bien-pensants » à faire autre chose que ce qui ne marche pas :
    http://www.lemonde.fr/economie/article/2009/02/14/le-g7-s-engage-a-lutter-contre-le-protectionnisme_1155583_3234.html

    La cupidité est amorale, immorale, morale ?

    @Verthuit
    On va gentiment se refocaliser sur le sujet qui est le protectionnisme et l’impossibilité de penser autre chose (même au sein des échanges internationaux). Tes commentaires sont ceux de l’archétype pavlovien. Tu dégaines le collectivisme (et pourquoi pas le stalinisme ?) pour étayer la thèse du libre échange comme supérieur. C’est l’agonie de la réflexion.

    « Le libéralisme étant le seul mode de création de richesse, il est impossible de perpétuer l’humanité en dehors de lui »
    amen !
    Et là, la pensée meurt, en direct.

    Par pitié, essayons de penser au delà…

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  12. @ Vogelsong :
    Il y a une méprise sur le vocabulaire. Quand je dis « libéralisme », je ne parle pas d’économie libérale, mais de système politique libéral (la démocratie libérale dans laquelle nous vivons). Celui-ci englobe la démocratie, l’État de droit et un marché libre.
    Je répète ce que j’ai dit sur mon blog pour justifier l’économie de marché dans une démocratie libérale :
    « les libéraux désirent l’instauration d’un marché libre, non parce qu’il est plus efficace, mais tout simplement parce que protéger la liberté et la propriété des hommes implique nécessairement de les laisser échanger librement leurs biens et services ».
    Le marché libre n’est pas un objectif à atteindre ou une religion, encore moins le fondement de la société. C’est simplement la conséquence du fait que si on décide de protéger la liberté d’agir en tant que droit de l’homme, ça implique forcément la liberté d’action économique.
    Choisir le métier que l’on a envie de faire, les biens que l’on a envie d’acheter, ça fait partie de la liberté.
    Le libéralisme n’est pas la fin de l’histoire, ça serait vraiment prétentieux de dire ça. C’est simplement le seul horizon que l’on puisse apercevoir.
    Verthuit a raison : toutes les alternatives à la démocratie libérale ont échoué. Il faut se rendre à l’évidence qui est : on a pas trouvé mieux.
    On peut essayer d’améliorer le système, ou en imaginer un radicalement différent. Mais pas se contenter de dire que le système n’est pas viable.

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  13. « Choisir le métier que l’on a envie de faire, les biens que l’on a envie d’acheter, ça fait partie de la liberté. »
    Elle est bonne. Une autre.

    Pour le reste tout est dans le texte

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  14. la liberté d’action économique ,mouaaahahahha c’est un concept de bisounours ça.

    Tiens dans un marche libre Je peux par exemple louer sur internet les filles de 16 ans de ma voisine du dessus ? Proposer à des chinois de loger dans ma cave? de vendre de la drogue sur Ebay ?

    Non la liberté d’action économique ne doit pas exister, sinon c’est accepter qu’une nation transforme ses salariés en esclave avec la complicité du big business US et UE. Le mot Régulation, ça vous troue le cul?

    laisser échanger librement leurs biens et services Voilà le problème: l’empreinte sociale et écologique des producteurs à très bas coûts ? Vous en tenez compte? Ou alors vous laissez ça aux prochaines générations?

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  15. Une tendance lourde se dessine: Tout autre système que celui fondé sur la rapacité et la cupidité serait non avenu par essence.
    C’est tout de même faire bon marché d’un certain nombre d’escroqueries politiques dont furent victimes les peuples au cours des âges.
    Tout système est de fait extrêmement délicat à mettre en oeuvre de façon à servir les buts qu’il s’est assigné pour une raison évidente: il exige énormément de qualités de l’homme.
    Le communisme et l’anarchie ne sont pas mauvais en soi, ils ont seulement été discrédités par ceux qui les ont utilisés comme paravent.
    On pourra dire la même chose du capitalisme.
    N’oublions quand même pas que l’étude économique de Karl Marx n’aurait jamais été qu’une thèse de plus sur les étagères de la Bodleïan sans le comportement des industriels et propriétaires terriens anglais…
    Autre chose étrange ces temps-ci: les ennemis les plus acharnés de Darwin sont les premiers à pratiquer un darwinisme social particulièrement féroce.
    Comprenne qui pourra…

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  16. Eric >
    Un système est un mécanisme.
    Le libéralisme est un mécanisme philosophique et économique au même titre que le communisme, a ploutocratie, l’aristocratie (au sens étymologique du terme) la théocratie ou l’oligarchie.
    Ce sont des machines qui ont pour but de faire « tourner » les sociétés humaines.
    La liberté n’est pas un système, et personne ne l’a jamais prétendu d’ailleurs.
    En revanche un mécanisme économique et/ou philosophique qui l’érige en vertu cardinale pour laisser s’exprimer les qualités de l’individu est un système.
    Il utilise la liberté comme moteur de son efficacité, c’est tout…

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  17. Le problème avec ce genre de débat c’est qu’en effet ce n’est pas évident de parler tous de la même chose, entre simplement admettre l’économie de marché et penser que la suppression de toutes les formes d’intervention étatique mène forcément vers un monde meilleur, il y a une certaine distance.

    Je tends à penser que le libre-échangisme international est surtout inévitable et qu’il n’y a pas de retour possible. Pour essayer de réguler ou humaniser la mondialisation, il faut partir de ce constat. Ensuite, jusqu’à présent (et on ne voit pas pourquoi cela changerait), le libre-échange a toujours été synonyme d’ouverture des marchés des faibles sans contrepartie (la PAC en étant le meilleur exemple : on vous vend nos merdes technologique, mais on ne veut pas de votre riz, blé, maïs…). Peut-être un échangisme (au sens, j’espère, de Devedjian) véritablement libre et égalitaire serait effectivement mieux que les hégémonies actuelles.

    Ce qui pointe le problème fondamental du « libéralisme », de toutes les dérégulations : la concurrence, fût-elle libre au départ, conduit inévitablement vers des inégalités qui se concrétisent en avantages qui sont alors autant d’entraves à la liberté. Sans régulation, et même régulation forte, il n’y a pas de libérté. C’est con, non?

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  18. Omelette sans eux> Tu mets l’accent sur un point qui semble échapper à tout le monde: Le but de la concurrence, loyale ou non, reste quand même de tuer le concurrent.
    Si la concurrence est dite « loyale », c’est un match sur un ring.
    Si elle est déloyale, on t’attend à un coin de rue pour t’estourbir.
    Le résultat est le même: Tu es mort.
    Si les prix sont encadrés par l’état, comme c’est le cas pour certains produits de première nécessité dans quelques pays, c’est la porte ouverte à toutes les escroqueries (dont la vente de marchandises gâtées avec une partie du prix payée par l’état directement au producteur, par exemple, l’état ne pouvant tout vérifier), parmi ces escroqueiries, la corruption des circuits de vérification et de distribution est la plus courante.
    On en est réduit au suicide généralisé faute de trouver une espèce humaine angélique…

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  19. « Le libéralisme étant le seul mode de création de richesse, il est impossible de perpétuer l’humanité en dehors de lui. »

    « Le capitalisme est un système amoral, inégalitaire, mais qui crée tant de richesses qu’il propulse l’ensemble de la société vers le progrès. »

    Oui, Paul et Verthuit ont beaucoup d’humour…

    La croyance (et j’emploie ce mot à dessein) en un « progrès pour l’humanité » dû principalement à « l’accumulation de richesses »… Et si c’était là que se nichait le désaccord profond ?

    « tous les autres systèmes économiques – et ils sont très peu nombreux – ne s’étant singularisés que par leur vibrant échec »

    C’est-à-dire : « on l’a jamais vu marcher, donc ça ne marche pas »… Heureusement que les chercheurs en sciences ne travaillent pas comme ça, on n’aurait pas encore inventé la roue… ni toutes les technologies dont les gens comme Verthuit sont sans doute si friands…
    De toute façon, ces « échecs » et les raisons de ces « échecs » restent à prouver/à débattre.

    Mais, pardon, je sors du sujet et cède à la tentation de m’élever contre des arguments stupides…

    « On en est réduit au suicide généralisé faute de trouver une espèce humaine angélique… »
    Ou bien on continue à penser qu’un certain contrôle de l’Etat limite la rapacité inévitable des uns et des autres (Sans atteindre la perfection, certes)… Non ?

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  20. Absolument ! Mille excuses de n’avoir pas saisi la finesse enjouée de votre remarque et le charme infini, très « Grand Siècle » ou « Grandes Ecoles », de votre argumentation.

    « Que voulez-vous, je suis provincial… C’est pour ça ! Un peu mal dégrossi, rougeaud, la casquette entre ses doigts gourds… Embarrassé devant le sermon assuré de celui qui sait.

    Aussi quelle n’est pas notre joie d’apprendre qu’au fond nous sommes d’accord avec ce monsieur ! On se sent, l’espace d’un instant, presque égal à ceux qui se penchent sur notre misère. »

    (E.Zola, « La Facture des Rougon »,tome XXXIII).

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  21. En fait, tu aurais dû limiter ton commentaire à « Oui not’maitre ! » en roulant le bord de ton béret et et les yeux fixés au sol.
    Bon ça va pour cette fois… (geste de César dans Astérix, envoyant ses généraux vers les confins de l’empire pour avoir voulu être calife à sa place).

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  22. lol ;)

    Bon, on ne continue pss, on va se faire gronder…
    Merci à tous pour vos commentaires instructifs sur le sujet ; et bien sûr merci à Vogelsong. Dans l’impatience de lire la suite.

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  23. Je ne suis pas un fan du protectionnisme, mais ça ne m’empêche pas de penser que des régulations sont impératives. Une régulation ne doit pas être perçue comme une contrainte, mais plutôt comme une condition pour maintenir un environnement sain.
    La régulation n’oblige pas à faire du protectionnisme: ce n’est pas parce qu’on impose certains règles de bonnes conduites qu’on ferme son marché pour autant.
    (PS: très bon billet)

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  24. Effectivement la Liberté n’est pas un système en tant que telle. Mais c’est en son nom qu’on crée des systèmes tels que la libre entreprise…qui paradoxalement aliène les hommes, du moins les travailleurs. D’où vient tout le mal. (Voir Marx).

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